Mgr Thuc (1897-1984)

Publié le par Vincent

Mgr Thuc est né à Phu-Cam, en Indochine, le 6 octobre 1897. Sa famille était noble, d'origine mandarinale et profondément catholique. À douze ans, il entre au petit séminaire d'Anninh ; puis poursuit ses études au grand séminaire de Hué, et enfin, à Rome et à Paris. Il obtiendra des doctorats en philosophie, en théologie et en droit canon à l'Université Grégorienne et il sera aussi diplômé de la Sorbonne. Ordonné prêtre le 20 octobre 1925, il rentrera à Hué en 1927 comme professeur de séminaire. Le Vatican commençant à créer, à cette époque, un épiscopat autochtone, choisit Mgr Thuc pour être le troisième évêque vietnamien. Il fut sacré le 4 mai 1938 par Mgr Dumortier, vicaire apostolique de Saïgon, après que Pie XI l'eut préconisé évêque titulaire de Saesina le 8 janvier de la même année. Mgr Thuc a été particulièrement actif dans le diocèse de Vinh-Long, qui avait été confié à ses soins pastoraux. Et c'est à lui également que l'Église vietnamienne doit la fondation (à Dalat) de sa première Université Catholique. En 1954, Ngo-Dinh-Diem, frère de Mgr Thuc, devient chef du gouvernement et l'année suivante premier chef d'État et président du Vietnam du Sud. Catholique et nationaliste, il était farouchement opposé au gouvernement français.

En 1960, le 24 novembre, Mgr Thuc reçoit le titre d'Archevêque de Hué (ancienne capitale de l'Annam) et celui d'Assistant au Trône Pontifical. Avec l'ouverture du concile Vatican II il part pour Rome. Le Président Diem est renversé par un coup d'État le 1er novembre 1963. Peu après Diem et toute sa famille sont odieusement massacrés. C'est à son départ pour Rome que Mgr Thuc doit d'avoir survécu à la fin tragique de sa famille.

Même ses adversaires au Vietnam considéraient Mgr Thuc comme un "excellent évêque". Toutefois, après la mort du président Diem et pour d'évidentes raisons "diplomatiques", Mgr Thuc fut dans l'impossibilité de reprendre sa charge dans son diocèse. Commença alors pour lui une vie d'exilé : "ici commencera ma Via Crucis, dans laquelle le Bon Dieu m'indiquera le tournant de ma vie", commentera plus tard Mgr Thuc (Einsicht, Mars 1982, Munich).

Le 17 Février 1978, Paul VI l'obligeait à démissionner. Dépourvu de pension il vécut dans la misère, à Rome, Casamari, Arpino, aidant les curés dans leur ministère, jusqu'à ce que des prêtres qu'il avait connus à Ecône l'invitent à se rendre en Espagne, au Palmar de Troya, près de Séville (Noël 1975). Le Palmar de Troya était un lieu ou étaient censées avoir lieu des "apparitions" de la Vierge. Ses "messages", particulièrement anti-modernistes mettaient en garde les fidèles contre la nouvelle messe et les réformes conciliaires. Mgr Thuc accorda-t-il un quelconque crédit à ces "apparitions" ? En tout cas, constatant le caractère en apparence traditionnel de la congrégation fondée par le "voyant" (Clemente Dominguez) il sacra ce dernier et quatre de ses compagnons évêques le 11 janvier 1976. Ces cinq évêques avaient bien sûr auparavant été ordonnés diacres et prêtres.

Immédiatement excommunié par Paul VI, Mgr Thuc rompit avec Palmar et obtint son "absolution". Il se retira alors à Toulon où il occupa une petite chambre, vivant dans une pauvreté extrême. En 1977, il reconsacre sub conditione, en secret, Mgr Laborie de Toulouse. Quelques années plus tard il entre en contact avec un groupe de traditionalistes de Munich qui lui font connaître le R. P. Guérard des Lauriers, O. P. Selon Sodalitium à cette époque et durant cette période Mgr Thuc, qui célébra toujours la messe traditionnelle, sauf la fois où, le Jeudi-Saint 1981, il concélébra dans la cathédrale de Toulon, était personnellement convaincu de la vacance du Siège Apostolique. C'est en effet à cette condition précise dont Mgr Thuc donna plusieurs fois l'assurance que le Père Guérard accepta de recevoir, le 7 Mai 1981, la Consécration Épiscopale. Le 17 octobre 1981, Mgr Thuc consacra également deux prêtres traditionalistes mexicains : Mgr Carmora qui était curé d'Acapulco et Mgr Zamora, religieux de La Merci. Au début de l'année 1982, il déclara publiquement à Munich la vacance du Siège Apostolique.
Rentré en France il consacra Mgr Datessen (le 25 septembre 1982) puis s'en alla quelque temps plus tard pour les États-Unis. Il séjourna dans le monastère d'un évêque de sa lignée et fut ensuite enlevé de force par des membres (catholiques) de la communauté vietnamienne réfugiée. Mgr Thuc fut alors "mis au secret" et fort peu de personnes purent obtenir de ses nouvelles jusqu'au 11 juillet 1985 où l'Osservatore Romano publia une "rétractation" de sa déclaration de Munich ainsi qu'une "demande de pardon" pour ses consécrations "illégitimes". Par la même occasion le journal du Vatican annonçait négligemment la mort du vénérable archevêque le 13 décembre 1984 à Carthage (Missouri, USA). Étrangement le nom de Mgr Thuc ne fut jamais retiré (jusqu'à l'année de sa mort) de l'Annuaire pontifical.

Extraits de l'ouvrage Le Soufre et l'Encens  © 1995

Publié dans episcopi

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